LE ROTABLATOR (BOSTON SCIENTIFIC)
Pour améliorer les résultats de l’angioplastie conventionnelle à la fin des années 80, de nouvelles techniques associées à l’angioplastie coronaire sont apparues, parmi elles l’athérectomie rotationnelle encore appelée “Rotablator”.
Mise au point en 1988 par le Dr David Auth aux Etats-Unis, cette technique était initialement utilisée dans le debulking des plaques calcifiées à la fin des années 80. Décevant en terme de résultat du taux de resténose lorsqu’il était associé au ballonnet, mis “de côté” en raison de l’évolution du matériel d’angioplastie et notamment avec l’avènement du stent dans les années 1995, le Rotablator s’est réinstallé dans l’arsenal thérapeutique des cardiologues interventionnels afin de traiter certaines lésions complexes, notamment lorsqu’elles sont calcifiées.
Si les lésions concernées par cette approche ne représentent que quelques % de toutes celles bénéficiant d’une angioplastie coronaire, le taux de succès avoisine les 95 %, à condition que cette technique soit réalisée par des équipes médicales et paramédicales dédiées à la cardiologie interventionnelle.
DÉFINITION
Le Rotablator est une technique d’angioplastie utilisant une fraise, dont la surface antérieure est recouverte de micro-particules de diamant tournant à très grande vitesse (en moyenne de 160 000 à 180 000 tours/mn) et qui va être amenée au contact de la lésion à traiter.
Le procédé consiste en une abrasion de la plaque calcifiée et permet ainsi de diminuer le volume de la plaque athéromateuse responsable du rétrécissement artériel. Les micro-débris issus de l’ablation ont pour la grande majorité une taille inférieure à 5 μm et sont absorbés par le système réticulo-endothélial puis éliminés par la rate.
L’utilisation de la fraise n’entraîne aucune lésion du tissu sain de l’artère, son mécanisme n’intéressera que le bloc calcaire formé sur l’intima.
INDICATIONS
- échec de franchissement du ballon ou du stent
- lésion très calcifiée
- sténose fibreuse (empreinte persistante à l’angioplastie conventionnelle)
- recoil immédiat
CONTRE-INDICATIONS
- présence d’un thrombus intra-luminal
- impossibilité de franchir la lésion avec un guide coronaire
- lésion située sur un pontage veineux
- dissection pré-existante ou post-angioplastie au ballonnet (contre-indication formelle dans les années 90, pas systématique à l’heure actuelle)
- dysfonction systolique VG sévère (FEVG< 30%) avec un seul vaisseau
MATÉRIEL
- La console
Elle est nécessaire pour réaliser les différents réglages utiles à la procédure, notamment ceux de la vitesse de rotation de la fraise. Elle affiche la durée du dernier passage ainsi que la durée totale de fraisage. Elle permet enfin de connecter à la fois l’unité motrice, l’azote médical ou air comprimé et la pédale d’activation.
1 : Vitesse de rotation
2 : Durée du dernier fraisage
3 : Connecteurs des fibres optiques de l’unité motrice
4 : Connecteur de la pédale
5 : Connecteur de l’air pour l’unité motrice
6 : Bouton marche/arrêt
7 : Bouton de contrôle de la vitesse de rotation
(ajuste le nombre de tours/minute)
8 : Indicateur de pression délivrée à l’unité motrice
9 : Durée totale de fraisage
Cette console est rattachée à :
– l’unité motrice ou « moteur »
– la bouteille de gaz (azote médical) ou air comprimé
– la pédale Dynaglide de commande : cette pédale est utilisée d’une part pour la rotation de la fraise et d’autre part, pour l’activation du système “Dynaglide” lors de la procédure de retrait de la fraise. Ce système permet de limiter la vitesse de rotation (60 000 à 90 000 tours/mn) lors du retrait.
- l’unité motrice
1 : bouton du système d’avancée de la fraise
2 : connecteur de gaz ou air comprimé
3 : connecteur de perfusion de sérum physiologique
4 : cathéter Rotalink
5 : extrémité du cathéter sur laquelle se situe la fraise
6 : bouton de déblocage du frein
L’unité motrice est constituée :
– d’une turbine à air utilisant du gaz comprimé pour générer les vitesses requises pour l’ablation
– d’un frein automatique empêchant le guide de tourner lors de la rotation de la fraise
– d’un bouton du système d’avancée qui, par un mouvement de va et vient effectué par l’opérateur, active l’avancée ou le recul de la fraise durant la procédure
- le cathéter Rotalink
D’une longueur de 135 cm, il est composé tout d’abord de la fraise recouverte de particules diamantées et d’un diamètre variable (1.25 à 2.5 mm), d’un câble d’entraînement recouvert d’une gaine qui protège l’artère lors de l’avancée de la fraise.
- le guide Rotawire
Le guide Rotawire est spécifique à cette technique. De diamètre 0,009 ” et de longueur 325 cm, il est choisi en fonction de la tortuosité et du degré de calcification de la lésion.
Il existe deux types de guide : le guide “floppy” ou le guide “Extra-support”.
Lors de la mise en place du guide, il peut être utile de placer le torqueur pince wireClip ou un torqueur classique pour faciliter la manipulation du guide.
Nota Bene : Afin de réduire l’échauffement crée par l’athérectomie, il est essentiel de mettre en place un système d’irrigation qui va simultanément couler entre le guide, la gaine de protection et la fraise de rotablator. Cette perfusion permet en même temps de lubrifier les parties mécaniques du système d’avancée.
Une poche d’irrigation, constituée de 500 cc de solution de Nacl à 0,9 % (1) dans laquelle sont rajoutés 5000 U.I d’héparine (2) et 5 à 20 mg de risordan (3), est mise sous pression à environ 300 mmHg. Certains centres la mettent au frais avant la procédure.
Cette préparation peut varier selon le protocole établis dans chaque centre. Par exemple, certaines équipent mettent de l’Isoptine à la place du Risordan ou font un mélange des deux (1 ampoule d’Isoptine 5 mg et 10 mg de Risordan).
Cette poche (4) est reliée au connecteur de la console par un perfuseur munie d’une chambre et d’un robinet pour pouvoir vérifier et contrôler son écoulement.
- le système d’alimentation en gaz
Il est composé d’azote médical ou d’air comprimé. La console de Rotablator sera reliée directement soit à une prise murale d’air comprimé spécialement installée pour cet usage de la salle de cathétérisme soit à une bouteille d’azote médical ou d’air comprimé à usage médical.
La pression de sortie doit être constante et comprise entre 6.5 et 7.5 bars. On utilisera un régulateur de pression (un manomètre) pour déterminer ce paramètre et qui nous indiquera à la fois la contenance de la bouteille et la pression du gaz en sortie.
TECHNIQUE
Selon le degré de calcification artérielle, il est préconisé de commencer l’athérectomie avec une fraise de petit calibre, puis d’augmenter la taille en fonction du résultat obtenu, en veillant à ne pas dépasser un rapport de 0,70 entre le diamètre de la fraise et celui de l’artère. Certains opérateurs peuvent avoir une approche différente.
Tout le succès de la procédure de mise en place du système revient aux paramédicaux, qu’ils soient « aide-opérateurs » ou « circulants ». Les différentes étapes de préparation sont détaillées un peu plus loin.
Le guide de Rotablator est placé dans la partie distale du vaisseau à traiter, comme tout autre guide d’angioplastie.
Eviter de positionner le guide rota dans de trop petites branches distales. En effet, les spasmes dus à la vibration du guide sont fréquents et d’autant plus difficiles à lever que l’artère est petite.
La fraise de Rotablator coulisse sur le guide comme tout autre matériel. Elle est testée avant son introduction dans le cathéter-guide, en-dehors du patient, en paramétrant le plus juste possible la vitesse de rotation qui sera fonction de la taille de fraise choisie.
En pratique, le fraisage de la plaque d’athérome permet de “picorer” la lésion par des mouvements de va et vient. La durée de chaque passage ne doit pas excéder 30 secondes : entre chaque passage, il est recommandé d’attendre au minimum le temps de fraisage.
En cas de résultat incomplet, la fraise peut être changée pour un diamètre plus important.
La procédure de retrait : une fois la lésion abrasée, la fraise est retirée selon une procédure bien définie.
- amener la fraise dans le cathéter-guide sans actionner la rotation
- activation du bouton”Dynaglide” de la pédale (voyant vert sur la console)
- retrait de la fraise qui tourne dans ce mode entre 60 000 et 90 000 tours/mn
La fraise est retirée en coulissant sur le guide de Rotablator jusqu’à la sortie du cathéter-guide. Lors de cette opération, le frein doit être déverouillé (par appui du bouton noir sur l’unité motrice).
PRÉCAUTIONS À PRENDRE/ TIPS & TRICKS
- Le choix de la fraise : la taille de la fraise va influencer sur le choix du cathéter-guide, et donc du désilet artériel.
Que la technique se fasse dans la foulée d’une technique d’angioplastie ou qu’elle soit programmée, il est important de tenir compte de la compatibilité entre les différents matériels utilisés
- Mettre en place une sonde de stimulation temporaire en cas de Rotablator CD ou CX dominate (risque de BAV)
- Attention à l’indicateur lumineux rouge de la console : ce voyant indique un dysfonctionnement qui peut être
– le blocage de la fraise dans la lésion
– une mauvaise arrivée du gaz
– un défaut de connections
– un problème soit au niveau de l’unité motrice, soit au niveau de la console
Le système se met en mode calage (voyant rouge) lorsqu’on observe une chute brutale de la vitesse de rotation de fraise (15 000 tours/mn en moins d’une demi-seconde). Il est du ressort du paramédical de veiller à ce que la vitesse de rotation de la fraise reste stable au cours de la séance d’ablation.
- Le guide Rotawire est extrêmement fin et est beaucoup moins maniable qu’un guide coronaire standard. La prudence dans sa manipulation est de rigueur car il peut facilement se couder, voire rompre. C’est pour cette raison qu’en cas de difficulté de franchissement avec ce guide 0,009”, on peut franchir la lésion avec un guide standard, puis faire un échange de guide avec un ballon coaxial
L’inverse est vrai aussi : lorsque la procédure est terminée, il est souvent utile, voire conseillé, de changer le guide de Rotablator en place en échange d’un guide 0,014” plus rigide ou amenant plus de support. Cette technique nécessite là aussi l’utilisation d’un ballon coaxial (OTW) comme décrit dans la vidéo qui suit, ou d’un microcathéter en cas d’échec de passage du ballon coaxial.
LES COMPLICATIONS
Les complications sont rares, mais peuvent être graves quand elles se produisent. Le Rotablator n’est pas dénué de complications, il est nécessaire que les personnels médicaux et paramédicaux soient parfaitement formés à cette technique.
On peut citer :
- la perforation de l’artère
- le blocage de la fraise dan la plaque pouvant entraîner une occlusion du vaisseau
- la tamponnade
- le slow-flow
- la dissection artérielle
- la rupture du guide
EN PRATIQUE
Retrouvez dans cette animation la mise en route d’une procédure de rotablator, que vous soyez paramédical circulant ou aide-opérateur.
N. B : toute personne (médecin ou paramédical) habilitée à utiliser le Rotablator doit suivre une formation complète auprès de la société Boston Scientific afin d’acquérir toutes les connaissances nécessaires pour utiliser le matériel et effectuer cette procédure en toute sécurité.
L’évolution vers le ROTAPRO
Ce qui change….
- une console digitale qui vous fournira plus d’informations
- une unité motrice plus pratique, tout étant à portée de mains de l’opérateur (avec notamment la disparition de la pédale pour activer la fonction Dynaglide)
- Au niveau de la console
- Au niveau de l’Advancer
Ce qui ne change pas…
- Le principe de lui-même de l’abrasion de la plaque calcifiée
- la fraise et ses différents diamètres
- la préparation de la fraise (testée en dehors du patient, en veillant à ce qu’elle ne soit pas en contact avec des compresses ou le champ stérile)
- la vérification du frein qui retient le guide (rotawire) pendant que la fraise est en rotation, avec le torqueur WireClip fixé sur le guide
- le réglage de la vitesse souhaitée de la fraise – la vitesse de plateforme est automatiquement réglée sur 160 000 tours/minute
- le réglage de la vitesse du mode Dynaglide
- le contrôle des manomètres pour garantir la mise sous pression du système
- le contrôle de la pression restante dans la bouteille
- une pression délivrée à la console de 7 bars
- le raccordement à une poche de sérum physiologique qui permet de refroidir et lubrifier les pièces en mouvement de l’Advancer
- le libre déplacement et de manière simultanée de la mollette de l’Advancer et de la fraise
- le choix des deux guides Rotawire, le Floppy et l’Extra Support
Merci à la société Boston Scientific pour l’autorisation de diffusion de ces différents documents